L’enfer me ment

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J’ai mal.
Mal à la vie, les nerfs à vif.
J’ai bu, fumé, agressé, et des envies de meurtre.
Je ne sais pas à qui s’adresse cette intention meurtrière, mais cela n’a plus d’importance.

Ceci n’est pas une lettre d’adieux, je n’en ai ni l’envie, ni le courage et encore moins la justification. Et je me fous des moins bien lotis, malheureux de tout poil, à qui, paraît-il, il est de bon ton de se comparer lorsque l’on vit un passage à vide fait de désespérance.
C’est simplement une lettre ouverte à moi-même, aujourd’hui le

22/02/03 à 16h48.

J’écoute Todd TERRY dont le titre de l’album est une pointe d’ironie pour mon état d’esprit : « Ready for a new day ! ». Je comprends mieux la fable du scorpion.

Il se passe que voilà, moi (l’ego est toujours puissant…), psy d’envergure, arrive au bout de 40 années de bons et loyaux  services envers toute personne désireuse de communiquer (elle  ne doit même pas être polie, propre ou distinguable.. ), au bout du bout de l’absurdité de ce que je croyais être : une personne bien.

Ce n’est même pas un constat douloureux, juste une prise de conscience que, in fine, toute cette commedia dell arte ne sert à rien et me renvoie un rire gras et collant, slim-esque.

Ma vie se réduit à peu de choses : une conception ? Un délire parental. Cela n’a pas dû être une partie de plaisir !
Voici les choses telles qu’elles m’ont été racontées par ma mère.

Elle a rencontré mon père après bien des déboires amoureux, il faut dire, qu’elle n’avait pas un modèle reluisant de mère et, le père, pour ce qui est de présence, nous n’en parlerons pas, inutile.

Donc le nid douillet amoureusement tissé qu’est une éducation saine, elle ne l’a pas vu venir … Sans mode d’emploi, il est toujours difficile d’avoir envie de communiquer, d’aller vers, de toucher et de goûter l’autre, donc il y a eu toujours une dualité très marquée chez elle.

Elle le voit, elle l’a vu, je n’ai jamais été mise au courant et, pourtant, ma mère n’a jamais été avare en ressassement de souvenirs ; à ce sujet j’ai appris bien 1000X la douleur que j’ai été en sortant de son ventre !

C’est peut-être pour ça que je ressens si puissamment la douleur d’autrui. Allez savoir ?

24/03 à ? h

Quand je pense, il y a bien longtemps, j’avais laissé ma main droite s’agiter au gré de sa fantaisie.
C’était il y a 15 ans, je sortais de prison, enfin j’y travaillais, mais je la  sentais ma cellule.

Un détenu (celui qui n’a plus de tenue ?) que j’adorais sans le savoir a dévergondé quelqu’un pour obtenir mon adresse.

Nous avions communiqué plus de 6 mois en tête-à-tête langoureux sous prétexte de parler de Nietzsche !  enfin c’était comme ça que je voyais les choses.

Un jour de canicule, il m’a demandé l’autorisation d’enlever sa veste éternelle bleue, j’ai obtempéré illico mais vu son air gêné, je lui ai demandé ce qu’il se passait … il était ennuyé car il portait un tatouage. Quand j’ai vu sous mes yeux ébahis écrit en géant
ROLLING STONES, j’étais pâmée !

Aucun homme, à cette époque, n’avait la moindre chance d’être simplement regardé, pleine que j’étais de l’impossibilité romanesque à aimer un bandit…

Nous étions la Roll Royce de la pensée, nous étions deux surhommes, personne ne pouvait atteindre notre  liberté  dans cet aquarium de misère.
Ca puait la jalousie, car en permanence, dès qu’il entrait dans mon bureau-cellule, un maton ou supérieur hiérarchique, trônait devant ma porte gaufrée.
Ils  n’avaient de cesse, pour ce détenu-là et pas un autre, à épier comme des épouvantails de cauchemar l’éventuelle scorie de  notre histoire. Pauvres d’esprit.

Ca été un grand amour, bidon, dans le sens obligé qu’a un homme privé de tout de parler à quelqu’un d’extérieur, et, qui plus est, une femme.
Et c’est vrai qu’en guise de femmes, il était servi…, une assistante sociale reptile, une autre supra catho, une infirmière barbue, et les dames patronnesses dont je ne dirai rien, en dehors de leur âge canonique, tellement elles m’ont révulsée par leur bêtise et leur vilenie.

Ca été un grand amour, vrai, dans le sens où il n’y avait pas d’attentes, pas de promesses, pas de solution acceptable, aucune bassesse d’aucune sorte.

Puis, durant 3 années consécutives, nous avons correspondu, pour parler de …Nietzsche !

« Est-ce encore bien possible…. je suis ici…. je vais…. je viens….je parle.
Je vois des gens…on dit que je vis !
Il paraît que c’est ainsi, que cela doit être ainsi !
On s’imagine peut-être qu’on va me le faire croire ?
On s’imagine sans doute que je vais l’accepter !
On ne sait pas que chaque jour qui passe ainsi, est un tremplin de plus en plus dur sur lequel je vais bondir un beau jour et m’abattre avec n’importe quoi dans les mains, n’importe quoi dans la tête pour saccager les nuits, les jours que j’ai déjà passés….et que personne n’osera me rapporter….ou avec les plus plates excuses….tant j’aurai sur le visage, la fureur inabordable du temps passé….du temps perdu »

Cette copine psychologue-agente matrimoniale m’a refait le coup, deux ans plus tard, avec cette fois dans sa manne au bonheur, un curé africain défroqué …

Elle a d’abord insisté, sur mon répondeur, afin que je lui téléphone sans délai vu l’urgence de la situation.
J’étais très loin, au soleil, et ne me doutais pas, innocente, de ce qui m’attendait.

Après trois messages, le son de sa voix s’étant fait lugubre, elle m’annonça tout de go, qu’un rendez-vous avait été fixé pour telle date..

De plus, j’ai reçu une communication de l’ex-prêtre qui me dit ce qu’il attend de moi, qu’il est heureux de faire ma connaissance et qu’il désire fonder un foyer! Ne m’a pas dit combien de petiots, je suis sensée pondre…

Mon degré d’incrédulité en écoutant tous ces messages frisait le ciel, moi qui ai horreur d’être mise au pied du mur…
Bon, j’ai fait comme d’habitude, je me suis dit dans une conversation serrée avec moi-même qu’il fallait y voir une opportunité de rencontrer un cas.

J’ai été gâtée. Je lui ai donné rendez-vous au Métropole, histoire de le voir tiquer à la note.

Je le vois, n’en crois pas mes yeux quand il se lève, il doit faire dans les 2m, 2m10, et reste fascinée comme Moogli face à Kâ, le serpent, quand mes yeux tombent sur ses narines !

Jamais, je n’avais vu cela, cela valait le déplacement, ce qui nous sert de trous de nez, avaient, chez cet homme, pris des proportions hallucinantes.
Deux soucoupes de tasses à thé, au moins.

Comme il remarquait que je n’étais pas très présente à notre « parade amoureuse », il a commencé à me bombarder de questions, ce que je pensais du mariage, des enfants, de Dieu, et tutti quanti. Il me plombait, j’ai donc attaqué, et lui ai dit qu’en fait je n’avais jamais été attirée par le mariage, préférant une relation mythique sans preuve papier à une convention de plus, et qui ne facilitait pas le divorce !

Deuxième bombe, l’histoire des enfants, je lui ai dit que j’étais essentiellement une femme d’extérieur, et que les bébés m’insupportaient, et que parler layette me rendait criminelle.
Il a ri doucement, mais m’a rétorqué que j’étais à son goût…
A son goût, quel toupet ! Une blanche pour un black ex-prêtre qui a eu l’illumination de s’inscrire dans une agence pour trouver l’épouse idéale… Moi ! Rien ne va plus, faites vos jeux.

Dernière attaque aérienne, j’ attaque le Pape, en lui disant qu’il est misogyne, sinon pourquoi refuser la capote dans les pays pauvres ? là où le taux du sida a atteint un chiffre astronomique ? Oui, pourquoi ? Peut-être que l’industrie des capotes a partie liée avec le Vatican…
Et les femmes violées par leurs assassins, doivent aimer l’enfant du viol, du massacre? Oui ! Il ne saurait être question d’avortement.

Et je rajoute : Et la sexualité « mise en religion » ? c’est très bien de sacraliser la sexualité pour tenter d’amoindrir le sentiment d’horreur que provoque l’inceste et qui se passe encore chez les Mormons, au nom de Dieu, et sans remords…

Et ce qu’on lui paie à cet homme dit Saint, sa papamobile, ses déplacements, ses piles pour rester debout, sa protection rapprochée, ses palais, sa coke ?
(Encore un peu, énervée comme je l’étais, je lui aurais fait un procès sur les sectes)

Où est la sainteté dans tout ça ?

A ce moment de mon discours, je commence à m’exciter sur le gaillard aux soucoupes, en lui lâchant le gaz qui tue : Et la pédophilie chez les curés de tout poil, du plus petit au plus grand, comment ça va ? C’est toléré à quel titre ? C’est protégé à quel titre ? C’est chic jusqu’où ?

Notre homme a renversé sa tête en arrière et est parti d’un grand éclat de rire!
Et il me rajoute au compliment précédent que je suis géniale quand je m’excite!

Que dois-je faire ? Je me suis coincée dans le discours, mais où ?

Après une palabre digne d’un marchand de tapis, je l’envoie sur les roses, le plus poliment possible.

Quand il part, je remarque quand même qu’il a un magnifique postérieur.

Donc, depuis ce jour, je ne rends plus service en aveugle, car c’est trop d’énergie.

J’écoute Flux Trax n°2 , toujours extraordinaire 11 ans après sa sortie.